mercredi 28 novembre 2012

Le meilleur et le pire

(500) Days of Summer de Marc Webb (2009)

Ce petit film indépendant a tout pour charmer. L'histoire relate les 500 jours de la vie de Tom qui seront affectés (en bien ou en mal) par Summer — une jolie jeune femme qui travaille à son bureau. Le scénario bien ficelé offre des allers-retours dans le temps, que l'on peut facilement situer puisqu'on nous indique duquel de ces 500 jours il s'agit. Le film, en plus d'être savoureusement interprété, regorge d'idées originales et rafraîchissantes. Si vous avez envie d'un petit film vraiment sympatique, optez pour (500) Days of Summer.

The Snowtown Murders de Justin Kurzel (2011)

Alors ici, on change totalement de registre avec un film qui relate l'histoire sordide du pire meurtrier en série de l'Australie. Le film n'est pas tant basé sur les meurtres que sur la façon dont il s'y est pris pour convaincre certaines personnes, principalement un jeune homme, de participer à ses «activités». Il s'agit d'un des films les plus dérangeants que j'ai écoutés. L'histoire se passe dans un milieu pauvre, dur, et la descente aux enfer du personnage principal est extrêmement troublante. Ainsi, même si les scènes de violence sont pour la plupart cachées et suggérées, le film est fort en horreur puisqu'il touche principalement l'aspect psychologique de l'histoire, ce qui vient nous toucher d'une façon encore plus intense que par la simple démonstration de scènes d'horreur. Ainsi, malgré sa dureté, il s'agit d'un film brillamment monté et joué, à voir si vous avez l'esprit ouvert, mais préparez-vous à passer un moment difficile.   

The Master

The Master — Paul Thomas Anderson (2012)

À l'occasion de la sortie d'un film de Paul Thomas Anderson (PTA), les cousines se sont offert une sortie au cinéma. Voici donc leur appréciation personnelle.

Cousine: PTA figure parmi mes réalisateurs préférés. Puisqu'il ne sort pas souvent de films (son dernier, There Will be Blood, remontait à 2007), ceux-ci sont toujours très attendus de ma part. Maître dans le style de «chronique», PTA nous offre ici une intrusion puissante dans la vie d'un gourou (toujours aussi merveilleux Phillip Seymour Hoffman, un acteur fétiche de PTA) et d'un de ses disciples alcoolique et instable, formidablement joué par Joaquim Phoenix. Ce film nous invite donc à explorer la force et le dévouement aveugle que peut engendrer la croyance. Un film d'une grande puissance à voir pour tous les cinéphiles dignes de ce nom.

Geneviève: Cela n'arrive que très rarement: un film où tout, du scénario au jeu des interprètes, de la musique à la direction photo, est admirable. Rares aussi sont les films qu'on désire déjà, tout de suite après la représentation, voir une deuxième fois — pour mieux comprendre les thèmes, les non dits, les niveaux de sens. The Master est de cette trempe. L'atmosphère de manipulation psychologique propre aux sectes, servie sur fond de société américaine étriquée et fermée d'esprit, est déconcertante. Et que dire du jeu de Seymour Hoffman et Phoenix? Ce dernier tient le meilleur rôle de sa vie: sa posture, son faciès, ses tics, son tourment tiennent du génie. Voilà un long-métrage d'une rare puissance qui explore à la fois la vulnérabilité, l'aveuglement et le goût de pouvoir des hommes.

jeudi 8 novembre 2012

Dans les bas fonds....

Das Boot, the Director's Cut de Wolfgang Petersen
(original: 1981, réédition: 2010)

Que diriez-vous de faire un voyage dans un sous-marin allemand pendant la Deuxième guerre mondiale? C'est ce que ce film offre, dans une édition spéciale de 3h30. Au début, je n'étais pas certaine que j'allais réussir à écouter le film jusqu'à la fin. Finalement, non seulement je l'ai écouté au complet, mais j'ai passé un excellent moment cinématographique. Je me suis totalement abandonnée à l'expérience, et pendant 3h30, j'étais avec eux dans le sous-marin. Suspense, action, attente... tout y est pour un généreux cocktail d'émotions. Il paraît que c'est un classique, je comprends pourquoi.
Into the Abyss de Werner Herzog (2011)

Par le réalisateur de Grizzly Man — un documentaire culte adoré de Cousin et Cousine —, Into the Abyss offre l'autopsie des conséquences d'un triple meurtre sur les accusés, leurs familles et les familles et amis des victimes. Les faits s'étant déroulés au Texas, l'un des deux meurtriers a été condamné à la peine capitale, et l'autre, à 40 ans de prison ferme. Herzog, pour réaliser ce documentaire, a lui même interviewé les nombreuses personnes liées à ce crime — dont le condamné à mort, 8 jours avant son exécution, qui nous apparaît jeune, souriant et l'air naïf... ce qui cadre difficilement avec l'idée que l'on se fait d'un meurtrier. Le tout se révèle très troublant, triste, et le crime d'une incompréhension totale. Le réalisateur, sans tomber dans les mélodrames et sans forcer son point de vue, demeure ferme sur sa position contre la peine capitale. Il s'agit là d'un excellent documentaire très bien ficelé.

Hauts et bas humains

Après les films de répertoire pseudo romantiques, me voilà plongée dans l'artillerie lourde: les films de réalisateurs établis, où les plus sourdes pulsions humaines sont mises au premier plan.

Carnage (2011)

Quel délicieux moment de cinéphile Cousine et moi avons-nous passé devant Carnage! Adapté de la pièce Le Dieu du carnage, de l'écrivaine française Yasmina Reza, ce long-métrage de Roman Polanski prend la forme d'une confrontation en vase clos entre deux couples — qui n'était à l'origine qu'une discussion à propos d'une bataille entre leurs fils respectifs.

Geneviève: Pour être efficace, ce genre de film à la Huis clos se doit d'être brillamment mis en scène et de compter sur un solide scénario. Et c'est ici le cas. On ne s'ennuie pas dans cette sournoise dissection d'une soirée entre deux couples, qui discutent dans l'appartement des parents dont le garçon a été le plus amoché au cours de la bagarre. D'abord un peu collet monté, âge adulte oblige, la discussion dégénère et les coups bas fusent: alors que l'un parle sans cesse au téléphone avec effronterie (prodigieux Christoph Waltz), sa femme commence à se sentir mal (délicieuse Kate Winslet) et s'attire les foudres de ses hôtes (solides Jodie Foster et John C. Reilly). Il faut bien sûr aimer les dialogues et la mécanique du théâtre pour apprécier Carnage, mais même les plus néophytes en cette matière seront aimantés par cette peinture de nos bassesses les plus humaines.

Cousine: Comme Geneviève, j'ai beaucoup aimé ce film. Le côté "pièce de théâtre"est très fort et se démarque principalement par un scénario et des dialogues d'une grande finesse. Bien que le film soit court (1h20), il en est pas moins efficace. À écouter en début de soirée, pour pouvoir écouter un 2e film après.


La piel que habito (2011)

Quel film sordide et tordu. Mais quel film. La piel que habito est une autre perle d'Almodóvar, qui nous a habitués à ses lentes dérives psychologiques bien charpentées — on se souviendra du touchant Hable con ella, il y a dix ans. Cette fois-ci, le réalisateur espagnol nous plonge dans le quotidien d'un chirurgien esthétique, qui se consacre à la création d'une peau ultrarésistante dans l'anonymat de son laboratoire privé. Mais autour de lui, on s'aperçoit bien vite que tout cloche: à commencer par la mystérieuse jeune femme qu'il tient recluse et qui tente, par tous les moyens, de s'échapper. Personnage central de La piel que habito, cette femme n'est que le premier des nombreux malaises qui nous montent au coeur durant deux heures, dans le va-et-vient entre présent et passé où l'histoire de fou du chirurgien se reconstruit. Un film troublant, qui secoue quand même.

The Bang Bang Club (2010)

Prenez quatre photographes de presse, déposez-les dans les rues de Soweto, en Afrique du Sud, juste avant l'élection de 1994 et ajoutez-y un brin de décadence: vous aurez ainsi le portrait de The Bang Bang Club, long-métrage de fiction — mais inspiré de faits réels — du réalisateur canadien Steven Silver. Si le film reste flou sur les événements historiques qu'il raconte — le conflit entre les Noirs pro-ANC et la communauté zouloue en plein apartheid —, ses airs de documentaire et ses impressionnantes reconstitutions ont en revanche de quoi captiver. On se promène, avec les quatre photographes tricotés serré, à même les rues dangereuses de la banlieue noire, dans les balles et les massacres au couteau, jusque dans les cases de familles qui veillent leurs morts sous une ampoule nue. Journalistiquement parlant, The Bang Bang Club est très bon — même s'il lui manque peut-être, pour avoir toute la grâce du cinéma, un peu de chair autour de l'os.

Inglourious Basterds (2009)

Je suis loin d'être une adepte des films de Tarantino, que je trouve insupportablement violents. Mais je dois dire que cette fois, Inglourious Basterds est une belle réussite, un juste dosage entre humour, drame, histoire et fantaisie, qui nous emporte dans l'Europe dévastée d'Hitler et ses sbires. Qui ne connaît pas ces basterds juifs partis scalper du nazi et qui, malgré leur maladresse, réussissent à faire trembler le terrible dictateur? Encore une fois, la direction photo est impeccable et les performances d'acteur, Brad Pitt et Christoph Waltz premiers, sont à couper le souffle — sauf peut-être celle de Mélanie Laurent, qui reste fidèle à tous ses autres rôles: d'une sécheresse formidable. Dommage, car son personnage de jeune juive cherchant vengeance est à lui seul un portrait de la résistance française au temps de l'Occupation. Mais malgré cette petite faiblesse, Inglourious Basterds a de la gueule.

Slumdog Millionnaire (2008)

Un peu comme Cousine, qui s'était demandé pourquoi il avait raflé tant de prix, je n'ai été qu'à moitié charmée par Slumdog Millionnaire. Même s'il nous plonge dans l'Inde jusqu'aux oreilles, même s'il est un miracle de réalisation, il lui manque une sorte de vérité fondamentale, une modestie. Oui, c'est cela, une modestie. Danny Boyle en a fait trop pour montrer l'Inde au reste du monde, ses beaux comme ses mauvais côtés, et tout va trop vite pour qu'on puisse véritablement encaisser l'Inde — et l'histoire. J'aurais préféré une caméra plus posée, un ton un peu moins grandiose qui aurait mieux collé à la complexité de l'Inde. Cela dit, l'histoire de ce jeune Indien né dans les bidonvilles de Mumbai, soupçonné d'avoir triché au jeu télévisé Who Wants To Be A Millionnaire puisque sa vie l'a un jour mis sur le chemin des bonnes réponses, est émouvante, entraînante et intrigante jusqu'au bout.


Atonement (2007)

Pour un film inspiré d'un livre traitant lui-même de l'écriture, Atonement est fort bien réussi. Dans le meilleur de la bourgeoisie anglaise étriquée, une jeune fille égoïste et jalouse profère un mensonge qui aura de graves conséquences sur la vie de sa soeur aînée, déjà malmenée par la guerre. Plus tard, l'enfant devenue grande se fera écrivaine pour recoller par les mots les pots qu'elle a cassés. Cela étant dit, la plus grande qualité d'Atonement est son scénario, judicieusement articulé autour d'un mystère dont la mécanique n'est dévoilée qu'à la fin — on n'a jamais vu plus original procédé de rédemption. Et s'il n'a pas l'allure ni le ton d'une morale, Atonement donnera quand même à réfléchir aux esprits les plus fins, et ce, même si le jeu toujours aussi vide de Keira Knightley gâche un peu la sauce.

Little Miss Sunshine (2006)

Quelle sympathique petite fable que ce Little Miss Sunshine, une sorte de comédie noire où l'on suit une famille rapiécée sur sa route vers la Californie, où la plus jeune souhaite participer à un concours de beauté. Ce n'est certes pas un grand chef-d'oeuvre, mais on ne peut pas faire autrement que rire tant la situation (à six dans une vieille Volkswagen, grand-père cocaïnomane et ado muet compris) est loufoque, désespérée, absurde même. Mais la scène est aussi profondément triste, car on aborde des thèmes sombres comme le suicide, la dépendance et la moquerie, la jeune Olive n'ayant rien d'une beauté, justement. Un film à voir surtout pour les acteurs, presque tous absolument délicieux — surtout Steve Carell en frère suicidaire homosexuel, qui cite Proust et parle philosophie alors que le reste de la famille mange du poulet frit en buvant leur litre de Coca. Savoureux.

The Painted Veil (2006)

Voilà une belle découverte presque inconnue des cinéphiles: The Painted Veil, un long-métrage planté dans les montagnes humides de Chine au beau milieu d'une éclosion de choléra. Les excellents Naomi Watts et Edward Norton incarnent un couple qui, marié un peu trop vite et sans trop d'amour, se retrouve coincé dans une villa sans air dans le danger d'un village de Chine, où le mari, bactériologiste, s'efforce de limiter les morts. Doté d'une photographie et d'une reconstitution historique appréciables — considérant que le film est plutôt axé sur la relation du couple —, mis en musique par l'incomparable Alexandre Desplat, The Painted Veil est une belle plongée: dans les terres chinoises, mais surtout dans les déraisons du coeur.